La 1re génération de patients atteints du VIH parvient à l’âge d’entrer en maison de retraite. Pour Jean Cyr Yombi, Chef de clinique à Saint-Luc, il n’existe aucun obstacle majeur à la prise en charge de ces patients dans ces établissements. Toutefois, ces derniers doivent s’y préparer.
Texte : Philippe Van Lil
Comment évolue la population des patients séropositifs ?
Jean Cyr Yombi : « Le nombre de nouveaux cas diminue parce que les préventions sont plus efficaces. Le nombre de morts diminue également car les médicaments sont efficaces. Cependant, le nombre global de patients atteints du VIH est en hausse puisque leur espérance de vie, qui augmente, est quasi similaire à celle de la population générale. Près de 50 % des patients VIH ont plus de 50 ans et cette proportion passera à 70 % en 2030. »
Leur état de santé est-il généralement plus préoccupant ?
J. C. Y. : « Oui, car le VIH les expose à beaucoup plus de comorbidités et de polypathologies que les autres personnes âgées. En moyenne, elles surviennent 10 ans plus tôt que dans la population générale. »
Les maisons de retraite sont-elles suffisamment préparées pour les accueillir ?
J. C. Y. : « Qui dit comorbidités dit polymédication. Cela complique la prise en charge. Je ne suis pas certain que nous sommes tout à fait prêts, à l’heure actuelle, à les recevoir, que ce soit en termes de gestion des patients ou même d’acceptation d’une population porteuse du VIH. Il faut donc sensibiliser les gens – aussi bien le personnel soignant que les autres pensionnaires – au fait que le VIH est une maladie chronique qui, avec le bon traitement, n’est plus transmissible. »
On imagine aisément la difficulté de supporter le regard des autres dans pareil cas…
J. C. Y. : « Effectivement ! Récemment encore, l’une de mes patientes atteintes du VIH est entrée en maison de repos. Elle n’avait pas envie d’y rester parce qu’elle avait l’impression d’y être stigmatisée. Il faut vraiment expliquer aux gens que le VIH n’est plus un problème en soi. Ce n’est pas normal qu’une personne âgée se retrouve dans un environnement qui la stigmatise. »
En réalité, peu de gens connaissent vraiment les conséquences de la séropositivité, même parmi les professionnels de la santé qui ne sont pas spécialisés dans cette maladie.
Que recommandez-vous sur le plan médical ?
J. C. Yombi : « Les maisons de soins et de repos doivent comprendre au mieux cette pathologie pour en maîtriser la gestion. En réalité, peu de gens connaissent vraiment les conséquences de la séropositivité, même parmi les professionnels de la santé qui ne sont pas spécialisés dans cette maladie. Le problème n’est pas le VIH en soi mais le fait que ces patients ont des polypathologies et des prises de médicaments en conséquence. »
À quoi le personnel des maisons de retraite doit-il être attentif ?
J. C. Yombi : « Toute prescription d’un traitement chez un patient VIH doit faire l’objet d’une vérification des interactions. Tout nouveau traitement peut en effet ruiner le traitement antirétroviral. Ensuite, avec un nouveau médicament, les interactions peuvent augmenter la toxicité, surtout chez des personnes âgées. C’est vrai pour le traitement antirétroviral mais également pour le nouveau médicament prescrit. »
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