La majorité des patients épileptiques peut être soulagée par voie médicamenteuse. Certains n’y répondent cependant pas. Riëm El Tahry, Neurologue et épileptologue, et Herbert Rooijakkers, Neurochirurgien, aux Cliniques universitaires Saint-Luc, nous détaillent les autres options.
Texte : Philippe Van Lil – Photo : Privé
Riëm El Tahry
Neurologue et épileptologue – Cliniques universitaires Saint-Luc
Herbert Rooijakkers
Neurochirurgien – Cliniques universitaires Saint-Luc
En quoi consiste l’épilepsie ?
Riëm El Tahry : « L’épilepsie est l’affection neurologique la plus fréquente après la migraine et concerne près de 1 % de la population. Certains neurones communiquent de façon pathologique dans le cerveau et y produisent des courts-circuits électriques à l’origine des crises. »
« Les crises focales débutent dans une région très spécifique du cerveau et y restent localisées. Il peut aussi s’agir de crises focales se généralisant aux deux hémisphères du cerveau. Il y a aussi des crises généralisées se propageant de manière quasi instantanée dans les deux hémisphères dès le début d’une crise. »
Quels sont les effets de ces crises ?
R. E. T. : « Le public pense souvent aux crises de grandeur ampleur. Mais cela peut aussi se traduire par une altération de la conscience ou quelques petits mouvements de la bouche et des mains. De manière générale, la mortalité est 2 à 5 fois plus élevée pour les patients épileptiques que pour la population générale. »
L’épilepsie est l’affection neurologique la plus fréquente après la migraine et concerne près de 1 % de la population.
« C’est dû à l’épilepsie en soi, mais aussi à ses causes ou effets éventuels : AVC, tumeurs, dépression associés éventuellement à des idées suicidaires. Il existe aussi le SUDEP (Sudden Unexpected Death in Epilepsy), où un arrêt cardiovasculaire induit par l’épilepsie provoque une mort subite. »
« Cela concerne un patient épileptique sur 1 000, mais pour des hommes jeunes qui ont une mauvaise hygiène de vie, qui suivent mal leur traitement, cela peut monter jusqu’à un patient sur 150. Chez les enfants épileptiques, on estime que 30 à 40 % des patients ont des problèmes scolaires. »
Comment peut-on traiter la maladie ?
R. E. T. : « Environ deux tiers des patients répondent bien aux médicaments anti-épileptiques. Reste environ un tiers des patients qui ne répondent pas à un traitement associant deux anti-épileptiques à dose appropriée. »
« Ce groupe de patients doit être référé à un centre d’épilepsie réfractaire, où on va étudier les autres options de traitement disponibles. Le but d’un centre comme le nôtre est de confirmer qu’il y a épilepsie, qu’elle est réfractaire et d’essayer d’identifier la zone du cerveau responsable. L’épilepsie peut par exemple résulter de petites malformations corticales qu’on ne décèle pas directement à l’imagerie. »
Un tiers des patients épileptiques ne répondent pas aux traitements médicamenteux. Dans certains cas, une équipe pluridisciplinaire peut étudier la possibilité d’une intervention chirurgicale.
« En impliquant différentes disciplines – neurologues, neurochirurgiens, nucléairistes, etc. -, on va établir un bilan préchirurgical pour étudier la possibilité d’un traitement alternatif aux médicaments, par exemple retirer la zone épileptogène de manière chirurgicale. »
« Ce n’est pas toujours possible. Il n’est pas question d’opérer un patient s’il risque de perdre la parole ou une fonction motrice. Parfois, on n’identifie pas la zone responsable ou il en existe plusieurs à travers le cerveau. »
Que faire dans pareil cas ?
Herbert Rooijakkers : « Nous proposons deux types de neurostimulation : soit celle du nerf vague, soit celle du noyau antérieur du thalamus. La stimulation du nerf vague par une électrode implantée permet de stimuler la diffusion de certains neurotransmetteurs, des substances qui combattent l’épilepsie. »
« L’électrode est placé autour du nerf, sur le côté gauche du cou, entre l’artère carotide et la veine jugulaire, et un boîtier au niveau de la poitrine. Cette opération prend moins d’une heure. »
« La neurostimulation du thalamus est beaucoup plus récente, avec des effets similaires à confirmer à plus long terme. Comme elle est plus invasive du fait qu’on intervient dans le cerveau, la stimulation du nerf vague devrait rester plus répandue. »
« Non seulement, elle réduit les crises, mais elle a également un impact considérable sur la qualité de vie des patients : moins d’urgences, moins d’hospitalisations, des patients plus alertes. »
🔢 En Belgique, on estime à quelque 60.000 le nombre de patients épileptiques
➡️Cet article a été rédigé en collaboration avec Livanova