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Hypercholestérolémie familiale : l’importance d’un diagnostic précoce

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L’hypercholestérolémie familiale (HF) survient à un très jeune âge, malheureusement souvent sans être diagnostiquée à temps. Le Docteur Olivier Descamps, maître de conférences à l’UCL et spécialiste en médecine interne à l’hôpital Jolimont, nous explique les causes, les effets et les traitements.

Docteur Olivier Descamps Spécialiste en médecine interne à l’hôpital Jolimont

Quelle est l’ampleur de la maladie et de ses conséquences ?

Olivier Descamps : « Le FH dans sa forme hétérozygote (HFhe), il touche environ une personne sur 300 par an en Belgique, soit environ 30.000 personnes actuellement. La maladie se caractérise par un taux très élevé de  ‘mauvais cholestérol’ (LDL-cholestérol) dès la naissance, au moins le double du taux habituel dans la population générale. Chez l’adulte, cela signifie un taux de cholestérol LDL d’environ 260 mg/dl au lieu de 130 mg/dl. Mais la différence est déjà visible à la naissance où les taux atteignent 60-80 mg/dl, alors qu’ils sont normalement très bas (environ 30-40). Dans la forme homozygote (HFho), qui est plus grave mais heureusement plus rare, nous avons environ 30-40 patients diagnostiqués en Belgique, soit environ 10  as extrêmes, avec des taux de cholestérol LDL atteignant des valeurs de 600 à 1000 mg/dl ! »

Comment expliquer ces taux excessivement élevés ?

O.D. : « En général, le taux de cholestérol est déterminé pour deux tiers par ce que le corps fabrique et pour un tiers par ce que nous mangeons. Chez les patients HFhe, il n’y a qu’une seule mutation génétique et elle n’est pas due à une production excessive mais à une incapacité du foie à éliminer le cholestérol car il a moins de récepteurs qui peuvent le capter dans la circulation. Alors que dans le cas de l’Hfho, vous héritez de deux copies d’un gène qui ne fonctionne pas correctement, une de chacun de vos parents. Dans les cas graves, l’activité des récepteurs des LDL peut être pratiquement nulle, ce qui se traduit par une absence d’élimination du cholestérol LDL. »

Il est recommandé à toute personne qui sait qu’un membre de sa famille a un taux de cholestérol très élevé de faire un test de dépistage du cholestérol.

Avec quelles conséquences ?

O.D. : « Cela entraîne des problèmes cardiovasculaires beaucoup plus précoces. En général, les patients qui n’ont pas cette maladie ont une incidence accrue d’infarctus, de maladies cardiovasculaires et d’accidents vasculaires cérébraux vers 60-70 ans. Ces mêmes problèmes commencent vers 30-40 ans chez les patients HFhe et même vers 10 ans et dans certains cas plus tôt chez les patients HFho. »

Comment peut-on diagnostiquer la maladie avant que ces problèmes ne surviennent ?

O. D. : « Une prise de sang suffit pour mesurer le cholestérol. Le problème est que ce type de test sanguin n’est généralement effectué qu’à l’âge de 40 ou 50 ans lors d’un bilan de santé. En Belgique, il n’est pas d’usage de faire un dépistage à la naissance ou au moment de la vaccination comme cela se fait – encore à titre expérimental – dans certains pays comme la Slovénie ou le Pays de Galles. Actuellement, il est recommandé à toute personne qui sait qu’un membre de sa famille a un taux de cholestérol très élevé ou a eu un accident cardiovasculaire avant l’âge de 60 ans de se soumettre à un test de dépistage du cholestérol. Le grand défi est surtout de détecter les patients avant une crise cardiaque. Des tests génétiques sont également disponibles pour confirmer le diagnostic. »

Quels sont les traitements existants et quelle est leur efficacité ?

O. D. : « Tous les traitements ne sont pas disponibles en Belgique. Comme les mutations génétiques varient, les différents mécanismes d’action des options de traitement font qu’il est intéressant de les combiner, afin d’abaisser le taux de cholestérol à un niveau plus proche de celui des personnes du même âge. Le FH est relativement facile à traiter, à condition de commencer lorsque les patients sont encore jeunes. En Belgique, le traitement consiste à prendre des statines et éventuellement à les combiner avec d’autres médicaments tels que les inhibiteurs de l’absorption du cholestérol, les anticorps monoclonaux (PCSK9), qui bloquent la dégradation des récepteurs des LDL, de sorte que les LDL puissent être absorbés pour être éliminés. Il s’agit d’une thérapie non chirurgicale qui élimine le cholestérol (LDL) du sang du patient.

Dans le cas de l’hypercholestérolémie familiale, dans d’autres pays, on envisage d’ajouter à cet algorithme de traitement des traitements approuvés, tels que les inhibiteurs de la MTP, qui bloquent la sécrétion hépatique des lipoprotéines de très basse densité (VLDL), réduisant ainsi le ‘mauvais cholestérol’. Certains pays ou ajoutent également un nouveau traitement à base d’anticorps monoclonaux (ANGPTL3) Il agit en diminuant la production de cholestérol LDL et en augmentant la dégradation du cholestérol LDL et d’autres substances grasses dans l’organisme.

Depuis mai, nous disposons également de médicaments à base d’ARN interférents pour le Fefh. Ils sont un peu comparables aux vaccins ARN contre le Covid, sauf qu’ici de petites chaînes d’ARN bloquent la formation de ces protéines PCSK9. Ces derniers médicaments d’exception sont très utiles chez les patients atteints d’hypercholestérolémie familiale. »

Dans de nombreuses maladies rares, les patients rencontrent des problèmes de remboursement. Est-ce également le cas ici ?

O. D. : « En Europe, une maladie est reconnue comme rare si moins de 1 personne sur 2000 souffre de la maladie spécifique HFhe. n’est donc pas considérée comme une maladie rare, puisque le taux de fréquence est supérieur à 0,1 % de la population mondiale. Ensuite, parce que, dans l’HFhe, les statines sont totalement remboursées, ainsi que ces fameux anticorps et molécules d’ARN spécifiques, qui coûtent de 5.000 à 6.000 € par an. L’INAMI les rembourse sur la base de la démonstration des critères de la maladie à confirmer par le médecin sauf pour l’aphérèse des LDL. Pour l’HFH, c’est légèrement différent ; de nouvelles recherches indiquent que la prévalence de l’HFH est d’une personne sur 160.000 à 300.000. La rareté rend donc le remboursement plus complexe et plus difficile. En fait, tous les traitements disponibles ne sont pas remboursés en Belgique. »

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