La santé mentale suscite encore trop de préjugés. Les personnes vivant avec un trouble mental sont souvent perçues à travers des stéréotypes qui les marginalisent. Pourtant, il est crucial de changer ce regard et de promouvoir une culture de respect où les droits de tous sont reconnus. Luc Detavernier, Directeur et administrateur-délégué de la Plateforme Bruxelloise pour la Santé Mentale.
Luc Detavernier
Directeur et administrateur-délégué
Plateforme Bruxelloise pour la Santé Mentale
Déconstruire les préjugés
L’un des préjugés les plus tenaces est l’association des troubles mentaux à la violence. L’OMS souligne que la majorité des personnes concernées ne sont pas violentes mais, en réalité, qu’elles sont elles-mêmes bien souvent victimes de violence. Pourtant, ces personnes sont perçues comme dangereuses, ce qui nourrit une méfiance injustifiée.
Les médias contribuent souvent à cette image erronée, en surmédiatisant les cas de violence impliquant des personnes atteintes de troubles mentaux. Il est crucial que les professionnels de l’information présentent une image plus juste de la santé mentale.
L’impact sur l’estime de soi et l’accès aux droits
La stigmatisation des troubles mentaux a des effets dévastateurs sur l’estime de soi et l’accès aux droits. Elle conduit souvent les personnes concernées à s’isoler ou à renoncer à demander de l’aide. Selon l’OCDE, ces personnes sont deux fois plus susceptibles d’être au chômage, ce qui renforce leur marginalisation sociale.
Il ne s’agit pas simplement de changer les mentalités, mais aussi de garantir que les personnes vivant avec des troubles mentaux puissent jouir de leurs droits fondamentaux.
L’accès au logement est aussi un problème, de nombreux propriétaires refusant de louer à des personnes souffrant de troubles mentaux, par peur de comportements imprévisibles. Cela renforce l’isolement et complique les relations sociales de ces personnes.
Promouvoir les droits fondamentaux et l’inclusion
Il est essentiel de garantir le respect des droits fondamentaux des personnes vivant avec des troubles mentaux, notamment en leur permettant de choisir leur traitement et d’accéder à des soins de qualité. L’approche du rétablissement, centrée sur l’autonomisation et la participation active des individus, doit être au cœur des politiques de santé mentale.
Une collaboration entre professionnels, décideurs et personnes concernées est nécessaire pour des soins adaptés et pour réduire la marginalisation.
L’importance des campagnes de sensibilisation
Les campagnes de sensibilisation jouent un rôle clé dans la lutte contre la stigmatisation. Des pays comme l’Australie ou le Royaume-Uni ont lancé des initiatives réussies visant à éduquer le public et à encourager ceux qui vivent avec des troubles mentaux à demander de l’aide sans crainte.
En Belgique, bien que des efforts aient déjà été faits, il est nécessaire que les écoles, entreprises et institutions renforcent leur engagement pour créer des environnements inclusifs. En éduquant dès le plus jeune âge à la diversité des expériences humaines, nous contribuerons à bâtir une société plus ouverte.
Éduquer à la différence
L’éducation est essentielle pour pour lutter contre la stigmatisation. Dès l’enfance, il faut enseigner le respect des différences en incluant des modules sur la santé mentale dans les programmes scolaires. Cela permet de démystifier les troubles mentaux et de réduire la stigmatisation, tout en soutenant les enfants directement ou indirectement concernés.
Vers une société plus juste et inclusive
En conclusion, la lutte contre la stigmatisation des troubles mentaux est un enjeu de justice sociale. Il ne s’agit pas simplement de changer les mentalités, mais aussi de garantir que les personnes vivant avec des troubles mentaux puissent jouir de leurs droits fondamentaux, sans discrimination ni exclusion. Les campagnes de déstigmatisation, l’éducation à la différence, l’implication active des personnes concernées dans les soins et la promotion de leurs droits sont autant de pistes à explorer pour construire une société plus juste et plus inclusive.
Il est temps de reconnaître que la diversité des expériences mentales fait partie intégrante de la condition humaine et que chaque personne, quelles que soient ses difficultés, mérite d’être traitée avec respect, dignité et compréhension.
Ensemble, nous pouvons contribuer à lever les barrières de la stigmatisation et à construire un avenir où la santé mentale est abordée sans tabou, avec humanité et bienveillance.