Pour les patients atteints d’un cancer, l’annonce de la maladie et le parcours de soins sont souvent synonymes d’un énorme impact psychologique. À cet égard, le Dr Andrée Rorive, Oncologue médicale au CHU de Liège, nous explique la manière dont le corps médical les accompagne de multiples façons avant, pendant et après leur traitement.
Texte : Philippe Van Lil
Comment annonce-t-on à un patient qu’il est atteint du cancer ?
Andrée Rorive : « M’occupant essentiellement de cancers du sein et de la peau, j’essaie toujours de lui expliquer avec des mots simples quels sont sa maladie, les différents types de cancers et de traitements et la prise en charge la plus adéquate pour lui. Si l’on veut que le patient puisse accepter et affronter cette épreuve, il est essentiel qu’il sache exactement ce qu’il a, s’il a des chances de guérison ou non, et pourquoi on lui propose par exemple une chimiothérapie plutôt qu’autre chose. »
Si l’on veut que le patient puisse accepter et affronter la
maladie, il est essentiel que le médecin lui dise exactement ce qu’il a et ce, avec franchise et délicatesse.
« Ceci exige à la fois de la franchise et de la délicatesse dans les propos du médecin. Il faut par exemple pouvoir annoncer les effets probables d’une éventuelle chimiothérapie : pertes de cheveux, nausées, fatigue, impact sur le quotidien, la vie sociale et professionnelle du patient. »
Sur quoi se base ce qui est dit au patient ?
A. R. : « Que ce soit pour ce qui se passe avant, pendant ou après les soins du patient, chaque dossier passe systématiquement dans des réunions pluridisciplinaires qui rassemblent entre autres des chirurgiens, des oncologues, des radiothérapeutes et des anatomopathologistes – ces derniers lisent les résultats des prélèvements pour nous donner exactement les caractéristiques d’une maladie. À la sortie de chaque réunion, on a un objectif thérapeutique pour chaque patient, dont celui-ci est informé.
Quels autres soutiens sont offerts aux patients ?
A. R. : « Les infirmières de liaison ont un rôle essentiel dans tout le trajet de soins du patient. Dans le cas d’un cancer du sein, elles préparent les patientes avant l’opération, leur fixent les rendez-vous chez l’anesthésiste, le chirurgien, l’oncologue, le radiothérapeute, etc. Elles prennent les patientes ‘par la main’ pour les mener d’une étape à l’autre. »
« À côté de ça, nous disposons aussi d’un pool de psychologues rattachés au service d’oncologie. Ils ont l’habitude de gérer les peurs liées à la maladie et à son traitement : effets secondaires, récidive, mort, etc. Le recours au psychologue n’est cependant pas systématique ; tout dépend du type de traitement et de l’état psychologique du patient et de ses réactions émotionnelles. »
« Enfin, il faut savoir que les patientes reçoivent un ‘carnet de liaison’ qui contient l’agenda de leurs rendez-vous, l’explications des effets secondaires des traitements qu’elles vont recevoir, les coordonnées des infirmières de liaison, des médecins, psychologues, esthéticiennes, diététiciens… bref tout ce que l’on peut proposer pour les soutenir. »
Il existe aussi des associations de patients et des groupes de parole…
A. R. : « En effet et cela fonctionne aussi très bien. Des amitiés s’y créent souvent entre patients, ce qui les aide à surmonter l’épreuve de la maladie. Au CHU de Liège, nous avons mis en place une revalidation oncologique, ouverte à tous les patients ayant subi un traitement – oral, immunothérapie, chimiothérapie, radiothérapie. Les patients s’y retrouvent par petits groupes pour faire du sport ensemble mais c’est aussi un lieu d’échange à propos de leur maladie. C’est un grand atout du point de vue psychologique. »
« Plus globalement, il est essentiel que les patients tentent de maintenir une vie sociale la plus normale possible, tout en faisant de l’exercice physique. Rester dans son divan du matin au soir engendre un accroissement de la fatigue, parfois des pertes cognitives en cas de chimiothérapie, une perte de la masse musculaire… et de moral ! »
BELUX-20210359-09/2021