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Cancer

Leucémie myéloïde aiguë : l’espoir de l’immunothérapie cellulaire

Pr Xavier Poiré

Chef de Clinique Associé

Cllinique universitaires St-Luc

Pr Philippe Lewalle

Chef de Clinique

Institut Jules Bordet

Attaquant la moelle osseuse, la leucémie myéloïde aiguë est l’un des cancers du sang les plus sévères. L’immunothérapie cellulaire offre toutefois un nouvel espoir tangible dans le traitement de cette maladie. Entretien avec deux spécialistes.

Texte : Maria-Laetitia Mattern

Qu’est-ce que la LMA (Leucémie Myéloïde Aiguë) ?

Pr Xavier Poiré : « La leucémie myéloïde aiguë est un cancer du sang causé par un dérèglement de la moelle osseuse qui produit les cellules sanguines. En cas de leucémie, la moelle osseuse ne fonctionne plus correctement et se met à produire des cellules anormales. Il existe deux sortes de leucémie aiguës : la leucémie myéloïde aiguë et la leucémie lymphoïde aiguë. Cette dernière est connue pour être la leucémie de l’enfant. La forme myéloïde est, pour sa part, plutôt une pathologie de la personne âgée, elle apparait surtout après 60 ans. »

Quelle est sa prévalence en Belgique ?

Pr Philippe Lewalle : « En Belgique, on compte 3 cas pour 100 000 habitants. Plutôt rare, il s’agit d’un cancer rapidement fatal, qui nécessite une prise en charge immédiate. »

Quels en sont les traitements ?

Pr Xavier Poiré : « L’âge reste un facteur important pour décider du type de traitement. Chez les patients jeunes, on optera pour des sessions de chimiothérapie intensive nécessitant de longues périodes d’hospitalisation. Une greffe de moelle osseuse viendra souvent consolider la réponse obtenue. »

« Pour les personnes de plus de 65 ans, la décision de traitement dépendra de leur état de santé général, allant de chimiothérapie conventionnelle (mais à moindre doses) à des traitements alternatifs visant à améliorer leur qualité de vie. La greffe de moelle osseuse est moins souvent envisagée à cause de sa toxicité. »

L’immunothérapie cellulaire consiste à utiliser les ressources de notre immunité pour obtenir une guérison.

En quoi consiste l’immunothérapie cellulaire ?

Pr Philippe Lewalle : « Les progrès récents dans le domaine du traitement du cancer soulignent le rôle essentiel joué par notre système immunitaire dans l’obtention d’une guérison définitive. L’immunothérapie cellulaire consiste à utiliser les ressources de notre immunité pour obtenir une guérison. »

« Acteur essentiel de l’immunité est le lymphocyte T qui peut éliminer des cellules ‘malades’, identifiées comme anormales à notre corps. L’immunothérapie avec les ‘CAR-T’ (pour chimeric antigen receptor T cell) consiste à prélever des lymphocytes T du patient, à les modifier pour les programmer à reconnaitre, grâce au récepteur chimérique, et à tuer les cellules cancéreuses. Ces cellules modifiées sont alors re-administrées au patient en grand nombre. »

Pr Xavier Poiré : « Contrairement aux idées reçues, l’immunothérapie n’exclut pas la chimiothérapie et celle-ci est même nécessaire à l’efficacité. Mais ici, cette chimiothérapie a pour but de créer l’environnement idéal au développement des cellules immunitaires modifiées. Sans cette chimiothérapie, les CAR-T ne pourraient pas survivre et agir face au système immunitaire déréglé du patient. »

Est-ce un procédé efficace dans le cas des LMA ?

Pr Xavier Poiré : «Ces CAR-T s’avèrent très prometteurs dans le traitement des LMA mais n’en sont encore qu’au stade préliminaire de leur développement. Actuellement, la principale barrière reste la grande hétérogénéité des LMA. Cela rend plus difficile l’identification d’une cible unique et spécifique aux cellules leucémiques, qui permettrait de fabriquer un seul médicament capable d’éradiquer les cellules cancéreuses sans empiéter sur les cellules saines. »

Certaines approches, en cours de développement, apportent un espoir tangible d’arriver à une immunothérapie efficace et peu toxique dans la LMA.

Quel est le défi pour l’avenir ?

Pr Philippe Lewalle : « Dans la LMA, le premier défi est de parvenir à préciser les cibles des lymphocytes T afin de détruire spécifiquement les cellules cancéreuses sans attaquer la moelle saine. Le deuxième est d’améliorer les CAR-T pour les rendre plus efficaces sur le long terme et parvenir à des guérisons définitives. »

« Certaines approches, en cours de développement, apportent un espoir tangible d’arriver à une immunothérapie efficace et peu toxique dans la LMA, bénéficiant au plus grand nombre. Avec le remboursement des CAR-T dans les leucémies lymphoblastiques et les lymphomes, une nouvelle ère s’ouvre pour l’immunothérapie cellulaire et un nouveau pilier vient à la fois bouleverser et compléter les schémas de traitements traditionnels. »

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