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Cancer

De sérieux espoirs pour vaincre le cancer

Cyril Corbet, Chercheur à l’UCLouvain, a été récompensé récemment par le Prix Galien 2019 pour ses recherches en pharmacologie. Ses travaux portent sur le ciblage du métabolisme des cellules cancéreuses et sur les opportunités thérapeutiques associées à l’acidification du microenvironnement tumoral. Explications…

Texte : Philippe Van Lil – Photos : Kris Van Exel

En quoi consistent vos recherches ?

« Les travaux que je mène depuis 2012 portent sur le métabolisme des cellules tumorales, c’est-à-dire la façon dont elles sont capables de s’alimenter pour produire de l’énergie et se reproduire. »

« Ma recherche s’intéresse en particulier à la manière dont les cellules tumorales s’alimentent au sein de la tumeur, lorsqu’elles sont confrontées notamment à l’acidose, autrement dit l’accumulation d’acides, qui est une caractéristique des tumeurs. »

Nous avons réalisé des tests chez la souris pour montrer que l’utilisation d’inhibiteurs avait un impact sur la croissance des tumeurs.

« Au cours des sept dernières années, on a montré que lorsqu’elles sont dans ces conditions d’acidose, les cellules arrêtent de consommer des sucres et se tournent vers d’autres sources d’énergie, en particulier les acides gras. On est ainsi allé à l’encontre d’un dogme établi il y a près de 100 ans par un biochimiste allemand, Otto Warburg, qui affirmait que les cellules tumorales utilisaient quasi uniquement des sucres pour produire de l’énergie. »

À quoi ces recherches ont-elles abouti à ce jour sur le plan thérapeutique ?

« Nous avons réalisé des tests chez la souris pour montrer que l’utilisation d’inhibiteurs – en l’occurrence des lipides – avait un impact sur la croissance des tumeurs. On a aussi désormais des molécules médicamenteuses qui ciblent l’utilisation des acides gras dans le cadre des maladies cardiovasculaires. L’objectif est à présent de pouvoir utiliser ces molécules pour des patients atteints d’un cancer. »

À quelle échéance ?

« Pour nous, l’objectif est de pouvoir administrer ces molécules d’ici cinq ans. Toutefois, des tests doivent encore être effectués chez la souris avant de passer aux patients atteints d’un cancer. Dans l’intervalle, nous travaillons aussi sur une autre approche : on veut prendre les cellules cancéreuses à leur propre piège. Nous voulons qu’elles se tournent vers l’utilisation de lipides toxiques, les fameux omega 3 et 6. Un taux important de ces lipides dans le sang pourrait avoir un impact sur la croissance des tumeurs. »

Les solutions sur lesquelles vous travaillez s’appliqueraient-elles à tous les cancers ?

« Nous tentons une approche commune, quel que soit le type de cancer. Dans la majorité des tumeurs, en tout cas des tumeurs solides – ce qui exclut les cancers du sang -, le microenvironnement tumoral est commun. Nos travaux ont montré que dans le cas des cancers colorectal, du col de l’utérus et du pharynx, le métabolisme des cellules tumorales en condition d’acidose est toujours le même. »

Bénéficiez-vous de suffisamment de soutien dans vos recherches ?

« Je suis français. Lorsque je suis arrivé en Belgique, j’ai pu constater l’écart entre les moyens plus importants mis à disposition dans les labos belges par rapport aux labos français. »

Il faut maintenir les efforts en termes de financements proposés aux labos de recherche pour maintenir une forme d’excellence belge.

« En Belgique, les moyens mis en place pour une recherche de haut niveau sont relativement conséquents. Et lorsque l’on les présente lors de congrès, les résultats de ces recherches sont reconnus en Europe et ailleurs dans le monde. Nous avons un impact certain sur la communauté scientifique, ce qui se traduit notamment en termes de publications relatives à nos travaux. »

« Cela étant, il faut maintenir les efforts en termes de financements proposés aux labos de recherche. Non seulement pour l’achat d’équipements techniques indispensables pour maintenir une forme d’excellence et ne pas être dépendants de labos à l’étranger, mais aussi pour le recrutement du personnel, que ce soit des étudiants en doctorat ou des chercheurs post-doctorat. Il faut maintenir la diversité des sources de financement telle qu’elle existe actuellement. »

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